À la rencontre d’Isabelle Keraval, Responsable qualité et commerciale à Farago Côtes d’Armor
Ce mois-ci, nous nous sommes intéressés à la lutte contre les chenilles processionnaires du pin. Nous avons échangé avec Isabelle Keraval, responsable qualité et commerciale de Farago Côtes d’Armor qui s’est intéressée à cette problématique sur son département début 2017.
L’objectif était de développer cette prestation dès septembre 2017.
En effet, depuis 2010, l’infestation des chenilles processionnaires progresse. À ce jour, la moitié du département des Côtes d’Armor est infestée (partie Est).
La biologie de la Chenille
La chenille processionnaire du pin est la larve d’un papillon de nuit, le Thaumetopoea pityocampa. Elle fait partie de l’ordre des Lépidoptères.
La femelle papillon recherche un pin pour y pondre ses œufs. L’éclosion a lieu cinq à six semaines après la ponte. Elle donne naissance à des chenilles qui muent trois fois avant l’hiver à des dates variant selon la région probablement liées à l’humidité, à la température ainsi qu’à l’amplitude thermique. Les jeunes chenilles tissent des pré-nids où elles passent la journée. Ces premiers abris légers peuvent passer inaperçus. Attention, une touffe d’aiguilles qui jaunit en est la principale manifestation.
Dès que la zone autour de leur abri n’offre plus assez de nourriture, les chenilles émigrent plus haut dans l’arbre et reforment un nouveau nid. C’est ainsi que par des journées ensoleillées, on peut les voir en procession sur le tronc ou les branches d’un pin. Elles vivent en colonies de plusieurs centaines de chenilles. Les larves commencent à manger le limbe des aiguilles de pin. Elles se nourrissent des aiguilles de diverses espèces de pins mais aussi de cèdres, provoquant un affaiblissement important des arbres.
Au printemps, les chenilles en procession conduites par une femelle, quittent l’arbre pour aller s’enfouir dans le sol à quelques centimètres sous terre (5 à 20 cm) dans un endroit bien ensoleillé. Les processions peuvent se déplacer jusqu’à 40 m. Les chrysalides transformées en papillon sortent de terre. Le cycle peut alors reprendre par accouplement de la femelle et du mâle qui meurt un ou deux jours après, alors que la femelle s’envole vers une branche pour pondre ses 70 à 300 œufs avant de mourir aussi. Les petites chenilles éclosent 30 à 45 jours après la ponte.
Il existe très peu de prédateurs naturels ; seul le coucou s’attaque aux chenilles, parfois même dans leur nid, et la mésange chasse la première forme larvaire et parfois les chenilles lorsqu’elles sont en procession.
Les conséquences
Les mairies sont de plus en plus sensibilisées dans le département des Côtes d’Armor faces aux risques sanitaires que cela peut engendrer.
En effet, les chenilles ont des effets urticants chez les animaux, mais également chez les humains. Des allergies très graves peuvent avoir lieu.
En cas d’incident ou d’accident chez les personnes allergiques sur les lieux publics, la responsabilité des communes peut être engagée.
Autre conséquence, la défoliation des pins très visible avec l’attaque des chenilles processionnaires.
Le traitement au Bacille de Thuringe
Pour développer cette activité en 2017, Farago Côtes d’Armor a proposé le traitement au bacille de Thuringe, produit biologique.
Le bacillus de Thuringe (Bacillus thuringiensis ou Bt) est une bactérie pathogène, provoquant une maladie chez l’insecte qu’elle agresse. Elle contient en effet une protéine, sous forme de cristal. Cette dernière, ingérée par l’insecte en même temps que la bactérie, libère une substance toxique qui se réparti dans l’intestin. Ne pouvant plus s’alimenter, la chenille meurt. La grande particularité du bacille de Thuringe est que cette bactérie naturelle, s’attaque à une catégorie de ravageurs mais est inoffensive pour tous les autres organismes vivants.
Pour appliquer ce traitement, Farago Côtes d’Armor a fait l’acquisition d’une turbine, posée sur un pick-up, capable de pulvériser à 30 mètres de hauteur. La période de traitement est très courte : de début mi-septembre à mi-novembre.
Le principe est de traiter chaque arbre infesté en pulvérisant le produit sur les aiguilles des pins et les nids.
Le traitement est inefficace s’il est réalisé par temps de pluie ou de vent. La météo est surveillée en permanence sur des sites spécifiques et le pick-up prêt à partir. Deux techniciens sont formés à cette prestation mais seul un technicien est nécessaire pour réaliser le traitement. Le technicien est équipé d’une cotte étanche, d’un masque respiratoire intégral et de gants en nitrile.
Les journées d’interventions peuvent être longues pour profiter des bonnes conditions météorologiques.
Avant d’investir dans ce matériel, Farago Côtes d’Armor a réalisé une étude de marché début 2017.
L’objectif prioritaire étant de répondre à une collectivité qui possède un camping de plusieurs hectares en bord de mer infesté de chenilles processionnaires. Les méthodes traditionnelles (échenillages, piégeages…) ne suffisaient plus à contrôler l’infestation.
C’est dans ce cadre, que Farago Côtes d’Armor a participé à des réunions avec l’INRA pour sensibiliser les habitants de la commune. Ces différentes campagnes ont fait l’objet d’articles de presse.
Fin 2017, Farago Côtes d’Armor a traité plus de 5000 pins sur une même commune (camping, particuliers, entreprises…). L’utilisation de la turbine a été optimisée.
L’INRA a mesuré fin novembre 2017 les traitements réalisés. Ces résultats sont très satisfaisants. Le traitement sera renouvelé en 2018 sur cette commune et sur d’autres communes voisines intéressées par le traitement et le résultat.
D’autre part, sur ces chantiers où il y a des zones protégées, Farago Côtes d’Armor a travaillé en étroite collaboration avec les associations de protection de l’environnement du département pour définir les zones à traiter. Ainsi, la faune non cible, notamment d’autres espèces protégées de papillons, est préservée.
Dans le département des Côtes d’Armor, et à ce stade d’infestation, Isabelle Keraval explique qu’il s’agit essentiellement de réguler la population des chenilles processionnaires plutôt qu’un traitement de fond, car le département est très infesté et les chenilles peuvent rester jusqu’à 5 ans sous terre.
« Nous n’aurons jamais la dernière… ! ».
Aucun traitement préventif n’est possible.
En complément, Farago Côtes d’Armor propose également la vente/pose d’écopièges et l’échenillage (méthodes complémentaires au traitement au bacille de Thuringe).